LA LOI DE LA DEUXIÈME CHANCE

Xavier Franquesa
Avocat
xf@espadagerlach.com

8 avril 2020

Les entreprises et les travailleurs indépendants sont le moteur de notre économie et de notre société. En ces temps d’incertitude où les revenus de leur activité sont affectés, ils peuvent profiter des mesures d’urgence approuvées par le gouvernement (R.D. 463/2020 du 14 mars) et des mécanismes de la seconde chance, qui peuvent sauver d’une mauvaise situation ceux qui ne peuvent pas faire face à leurs dettes.

En Espagne nous avons la loi sur les faillites et la loi 25/2015 du 28 juillet sur le mécanisme de la deuxième chance, la réduction de la charge financière et d’autres mesures sociales. Depuis la publication de cette dernière en 2015, les particuliers, qu’ils soient particuliers ou indépendants, peuvent obtenir une exonération des dettes non acquittées.

Il s’agit d’un mécanisme destiné à aider les personnes qui ont traversé une situation économique grave à prendre un nouveau départ ou à restructurer leurs dettes afin qu’elles ne soient pas obligées de fermer leur entreprise.

Grâce à cette loi une limitation du principe de la responsabilité patrimoniale universelle de l’article 1911 du Code civil espagnol est opérée, dans le but de remédier au problème du surendettement des familles qui, en raison d’une expérience commerciale ratée ou d’autres causes telles que l’urgence sanitaire provoquée par le coronavirus COVID-19, se retrouvent face à une dette impayée.

1) Avantages de l’utilisation de la loi de la deuxième chance:

Elle permet à un particulier ou à un travailleur indépendant de bénéficier d’une procédure très similaire à la procédure d’insolvabilité -à laquelle les entreprises sont soumises lorsqu’elles sont en état d’insolvabilité- avec la possibilité de renégocier les dettes par un règlement extrajudiciaire et même, dans une phase ultérieure (procédure d’insolvabilité consécutive), d’obtenir la remise des dettes impayées si elles ne disposent pas d’actifs suffisants

Elle donne aux tribunaux le pouvoir d’exonérer un pourcentage qui ne peut pas dépasser 70 % des dettes envers le Trésor et la Sécurité Sociale, dans certains cas, et d’ordonner, de limiter et de quantifier les paiements échelonnés du reste de la dette.

Les dettes garanties par une hypothèque ne pourraient initialement pas être exemptées de paiement. Toutefois, s’il existe déjà une procédure d’exécution hypothécaire dans laquelle le bien a été mis aux enchères et que l’enchère obtenue n’a pas couvert la totalité de la dette, le débiteur pourrait bénéficier d’une remise de dette sur le montant restant à payer.

Le fait que la loi de la deuxième chance soit appliquée ne signifie pas que vous ne pouvez pas continuer à travailler et à recevoir un salaire, ou continuer à exercer l’activité professionnelle ou commerciale que vous avez exercée.

Tout cela signifie qu’un juge vous exonérera de vos dettes (exonération immédiate), ou que vous conclurez un accord de refinancement avec vos créanciers, ce qui vous permettra de sortir de la situation actuelle, d’arrêter les saisies, etc. (exonération différée).

2) A qui s’adresse la loi de la deuxième chance?

  • Administrateurs de sociétés: ceux qui restent endettés après la dissolution de leur société ou qui ont garanti la société avec leurs biens personnels peuvent en faire la demande.
  • Les indépendants: ceux qui se retrouvent sans financement pour poursuivre leur activité et voient leur dette familiale augmenter.
  • Personnes ayant des dettes dues au manque de travail, à des charges en leur nom, principalement des hypothèques ou des contrats avec des institutions financières.

3) Conditions pour être éligible à la loi de la deuxième chance:

  • Absence d’actifs qui permettent de faire face aux dettes et de mettre tous les biens encore détenus à dispositions des créanciers, à l’exception de ceux de première nécessité et, dans le cas des indépendants, de ceux qui sont indispensables au développement de l’activité professionnelle.
  • Le montant des dettes ne doit pas dépasser les 5 millions d’euros.
  • Être un débiteur de bonne foi conformément aux dispositions de la loi sur les faillites (article 178 bis, paragraphe 3).

4) Conclusion:

Les personnes dont les entreprises et les sociétés sont touchées par l’état d’urgence décrété à cause de la situation de crise sanitaire provoquée par COVID-19 se voient offrir une issue. Ils ont la possibilité de restructurer leurs dettes plutôt que de devoir fermer ou la possibilité de reprendre leur activité sans rester endetté.

Il s’agit d’obtenir un accord avec leurs créanciers qui leur permettra de gagner du temps pour vendre des actifs et éviter une saisie généralisée, d’obtenir la suspension des intérêts sur les prêts sauf ceux garantis par des hypothèques, de faire cesser les privilèges et les saisies et de cette manière, de réduire la dette.

Et si finalement aucun accord n’est conclu, leurs dettes peuvent être annulées.